Lorsqu’il raconte, le conteur s’adapte spontanément à son
public en choisissant ses mots, en expliquant un détail. Mais il peut arriver que le conteur en changeant de contexte culturel opère une transformation radicale .C'est ce qui s'est produit pour les premiers contes de la collection "Conte à colorier" des éditions Ganndal. Les deux premiers titres sont adaptés de contes européens.
Ce sont des contes de randonnée dont le principe est la répétition d'un
motif. Dans le contexte local où les enfants apprennent le français
en même temps qu’ils apprennent à lire, la répétition est un
bon moyen de mémoriser le vocabulaire et d’apprendre la langue.
Dans l’apprentissage de la lecture, la répétition rassure l’élève
et le confirme dans sa progression.
Pourquoi avoir choisi ces contes ?
C’est venu d’un souvenir d’enfant : le bonheur de lire un texte long dont le sens était totalement accessible et d’autant plus facile à lire que les motifs se répétaient ; une poule trouve des grains de blé. Au lieu de les picorer, elle décide de les cultiver et demande à ses amis de l’aider (motif répété) à labourer le champ, semer le blé, le moissonner, le battre, le vanner, moudre les grains, pétrir la farine et cuire le pain. Aucun des animaux de la ferme (chien, chat, cochon, canard, dindon, etc. ) n’accepte "Pas moi, dit le chien, pas moi dit le chat, pas moi dit le canard", etc...(autre motif répété) et elle fait tout le travail avec ses poussins. Au moment de partager le pain, tous les animaux accourent mais la petite poule les repousse et va le manger avec ses poussins.
Ce conte traditionnel connaît le succès dès la classe de maternelle à cause de la maman poule, rassurante, de la structure répétitive et de la réponse des animaux qui fonctionne comme un refrain que les enfants mémorisent facilement, surtout si on les encourage à imiter le cri des animaux.
Comment le transformer ?
Ce conte raconte le cycle du blé de la graine à la miche de pain ? Le blé en Europe a été la base de l’alimentation pendant des millénaires. Mais quel lien y a-t-il entre le grain de blé qu’on ne voit jamais en Guinée et l’enfant qui mange son pain ? C’est là que commence l’adaptation du conte :
Il fallait une graine qui constitue un aliment de base. Le mil, le fonio, le riz, le maïs ? Le maïs est intéressant parce qu’il pousse partout en Guinée. Il est gros et repérable. On mange ses épis braisés dans les rues de la capitale et il entre dans la composition de nombreux plats une fois pilé.
Quels animaux choisir pour accompagner la poule ?
Si le chien et le chat sont des animaux familiers en Guinée, le cochon a parfois une mauvaise réputation , le canard ne vaut guère mieux et le dindon est rare. La chèvre est venue compléter le trio, elle est bien connue et elle évoque le monde rural.
La structure du conte, ne change pas, nous avons les personnages, il ne restait plus qu’à dérouler le cycle du maïs en faisant attention à la langue : des mots du langage courant (maïs, daba, semer, pousser, récolter, piler, préparer, couscous...) ; utiliser des phrases courtes et simples.
Irina Condé a mis les situations en images à colorier. La couverture en couleur donne des indications que l’enfant suivra ou non ! Ce conte peut être compris dès la maternelle et le coloriage va donner à l’enfant la maîtrise de la main et du poignet indispensable avant d’aborder l’écriture.
En CP ou en Cours élémentaire, dès qu’on est capable de déchiffrer et comprendre un texte long, on rentre dans le plaisir de la lecture. Et pour reprendre l’idée de partage en famille développée par Tiguidanké Diakité, on espère que les plus âgés auront envie de le lire à haute voix ou de le dire à leurs frères et sœurs, réactivant ainsi l’oralité du conte.
On pourrait fort bien imaginer un atelier d’écriture avec des enfants un peu plus grands, en leur proposant de réécrire le conte avec des grains de fonio, de mil ou de riz. Quels seront les éléments à changer dans la culture de la graine ou dans la préparation du plat ?
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